Comment notre monde a cessé d’être chrétien. Anatomie d’un effondrement.
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CUCHET, Guillaume.
Paris : Seuil, 2018, 284 p., 21 €
En France, en 1872, 98 % des 36 millions d’habitants étaient catholiques. Et envoyaient aux commandes de l’État, par les urnes, des majorités laïques voire anticléricales, sans que l’on ait réfléchi à
cette contradiction. Depuis, le catholicisme a reculé. Les 18-50 ans non affiliés au catholicisme sont près de 50 %, et l’Islam, avec cinq millions de fidèles, est devenu la seconde religion du pays. Selon une enquête réalisés en 2017, l’épiscopat estime qu’un tiers d’une génération est baptisée dans les sept ans et que le taux de pratique dominicale (tous les dimanches) est de… 1,8 % (p. 16, note 15). Et de s’interroger sur le décrochage, international (au Québec, un film, Un heureux naufrage en rend compte). Pour étudier ce décrochage, Guillaume Cuchet s’attache aux Matériaux pour l’histoire religieuse du peuple français, du chanoine Boulard qui livre une « auto-analyse sociologique » sur la pratique religieuse en France dans les années 1945-1965. Un premier chapitre du livre de Guillaume Cuchet décrit cette enquête qui révèle une grande variété de situations, en particulier, les trois pôles géographiques majeurs de la France chrétienne : le grand Ouest ; l’Est lorrain, alsacien et jurassien ; le rebord sud-est du Massif central (Haute-Loire, Tarn, Lozère, Aveyron). Démêler le rural de l’urbain ainsi que les conséquences des guerres mondiales, amènerait à penser une déchristianisation antérieure aux guerres, à la politique laïque et anticléricale de la IIIe République, voire, au XVIIIe siècle. Immanquablement, pour Cuchet, la Révolution française porte sa part de responsabilité : « La politisation de la question religieuse a été, en France, pour toute une partie de la population, un facteur de longue durée de dévitalisation religieuse » (p. 80). Certes, demeure un attachement à la culture catholique : la géographie des dons aux « œuvres » ou du don du sang atteste de valeurs, comme un style politique étranger aux extrêmes, des rites de passage ou l’attachement au patrimoine culturel. Toutefois, sans pratique, cette culture « s’en ira avec la seconde parce que leurs destins sont liés » (p. 84).
Quelques nouvelles juin 2025
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DEVENIR DISCIPLE DE JÉSUS (4)
Comment moi, chrétien du vingtième siècle, je vois Jésus, comment je l'actualise, comment je reçois de lui,comment m'est-il présent aujourd'hui ? (…) Ce qui me frappe d'abord avec beaucoup d'émotion, c'est que tout ceque je vois dans la vie de Jésus, je le comprends parce que je l'ai déjà moi-même vécu un petit peu. C'estjustement en le comprenant dans ma propre vie que je le découvre au-delà de la lettre, dans ce que Jésus afait et dans ce qu'on m'a dit de lui. Inversement, en entrant plus en profondeur dans ce que je crois que Jésus a vécu il y a vingt siècles, je me comprends plus profondément. Jésus est le chemin. Il est tout à fait normal que,puisqu'il est le chemin, je le découvre davantage à mesure que j'avance vers lui et que, à mesure que je comprends mieux ce qu'il a vécu, je me comprenne mieux moi-même.
La première période qui me frappe et qui me touche profondément, c'est ce qui s'est passé à l'âge de douze ans,lorsqu'il est monté à Jérusalem avec ses parents et où il se manifeste enfant de caractère. Il a fait une fuguece jour-là. Il n'a pas demandé à ses parents l'autorisation de rester parce que probablement on ne la lui aurait pas donnée. II est resté au temple parce que les questions religieuses l'intéressaient profondément. Les parents l'ont retrouvé et il leur était soumis, comme il est dit dans les écritures. Mais au moment où il a pris la décision derester seul, laissant ses parents retourner tranquillement, il a manifesté à la fois une vigoureuse indépendance, du caractère par conséquent, et un vigoureux intérêt pour les questions religieuses.
L'âge de douze ans n'est pas un âge quelconque.(…) On a comme une idée à ce moment-là de ce qu'on feraplus tard, une idée fausse d'ailleurs parce qu'on conçoit son avenir à partir du milieu dans lequel on se trouve,par conséquent dans des conditions sociologiques très différentes des événements qu'on rencontrera plus tard.Mais, en vérité, l'esprit fondamental qui s'incarne à partir de ces notions initiales se trouve le même. C'est unedes joies d'un vieux de s'apercevoir que, quand on a été suffisamment fidèle, l'esprit fondamental de ce qu'onvit maintenant est tout à fait dans la ligne de ce qu'on vivait jadis, comme un enfant peut le faire avec des idées fausses mais en définitive avec l'idée fondamentale qui sera l'idée maîtresse du sens de sa vie.
Voilà le premier point. Jésus, vers l'âge de douze ans a manifesté une première prise de conscience de ce quiallait être le sens de sa vie, sa mission. Et puis, pendant longtemps on n'entend plus parler de lui. C'est versl'âge de trente ans que nous le voyons de nouveau apparaître dans les foules qui se rendent sur les bords duJourdain pour se faire baptiser par Jean. (…) Il rencontre Jean-Baptiste. La rencontre de deux grands. Jeanreconnaît en lui un maître, un disciple de choix pour le moins. Jésus reçoit de cette rencontre une prise deconscience singulière de sa mission. Ceci bien entendu est présenté dans les écritures avec les formes dutemps que vous connaissez.
Ceci est aussi une réalité qui peut être vécue par chacun d'entre nous et qui l'est souvent. Nous avons besoin d'êtreamorcés dans la vie spirituelle par quelqu'un qui nous a devancés sur le chemin et qui nous est suffisamment proche pour que sa présence éveille en nous une nouvelle présence. Je vous avoue pour ma part que j'ai eu cettegrâce, vers l'âge de vingt ans, avec la rencontre de quelqu'un, dont on connaît maintenant un peu le nom,puisqu'on vient de fêter le cinquantenaire de sa mort il y a quelques mois, Monsieur Portal. C'est lui qui m'aéveillé à la vie spirituelle, moi qui étais un petit enfant bien sage ayant été au catéchisme de persévérance, quisavais un tas de choses sur la crise protestante mais qui ignorais radicalement tant de choses plusessentielles sur l'Église au moment où elle n'était pas si brillante que ça. (à suivre)
Marcel LÉGAUT, Bruxelles 1976
Articles et conférences
Cahier 8 Tome II p.275-276 (éd. Xavier Huot)
Edito - juin 2025
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Pape François. In memoriam !
Juger le pape à travers le prisme politique droite gauche n’a aucun sens. Le souci de François a toujours été d’actualiser la doctrine sociale de l’Église avec sa sensibilité propre d’homme issu de l’Amérique latine. Sa seule ambition : nous donner le goût de relire l’Évangile pour le rendre vivant dans nos vies de chrétiens trop souvent tournées vers des rites, des habitudes et des réflexes de pensée d’où le souffle de l’Esprit reste absent. Avoir le souci des plus pauvres en nous tournant « vers les périphéries », respecter la planète, notre maison commune, travailler à faire davantage de l’Église « un hôpital de campagne », être fidèles à la prière, nous sommes avec lui bien au-delà des étiquettes. C’est tout cela que j’ai ressenti avec le pape François. Il nous a poussés à mieux vivre notre foi et à mieux comprendre notre monde traversé par de grands courants de pensée et de mœurs différents sans juger systématiquement mais plutôt en essayant de répandre un peu plus la joie du « parfum de l’Évangile ». (JD, Journal La Croix, courrier des lecteurs, vendredi 9 mai 2025, page 15).
Les femmes votent pour élire leurs dirigeants. Mais les catholiques sont privés de voter pour le dirigeant le plus cher à leur cœur : le pape ! Quand on y réfléchit, cela paraît vraiment étrange. Partout les femmes chrétiennes sont les plus proches des pauvres, des abandonnés sur les rives de la vie, elles transmettent la foi aux enfants. Elles sont les piliers des familles et des paroisses. Elles sont aussi les premières à souffrir des guerres, des famines, des luttes de pouvoir des hommes. Dans un conclave, leurs voix seraient sûrement celle de la miséricorde de Jésus. Des femmes enfermées avec les cardinaux en conclave ? Non, cela ne semble pas possible dans le rite actuel. Par contre, pourquoi pas des femmes dans les congrégations préparatoires qui apporteraient leur expérience et leurs attentes ? (MH, Journal La Croix, courrier des lecteurs, vendredi 9 mai 2025, page 15).
À la droite du père. Les catholiques et les droites de 1945 à nos jours
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À la droite du père. Les catholiques et les droites de 1945 à nos jours, Seuil, 2022, 783 p.,
Ouvrage collectif sur la direction de Florian Michel et Yann Raison du Cleuziou.
Si les droites en France ont été explorées par les travaux de René Rémond (La Droite en France, 1954, et ses rééditions), l’analyse du vote des catholiques restait un angle mort : les 3/4 des catholiques ont continué à voter à droite durant la période de 1945 à nos jours. Certes, un travail de défrichage a eu lieu, mais seuls les extrêmes ont été labourés, ne serait-ce que LMPT (La Manif pour tous). Le choix des responsables est double :
- Assurer un développement chronologique qui rend compte des évolutions, avec de 1945 à 1958, la Libération et la revanche des démocrates chrétiens, le MRP et ses figures, dont on découvre, pour Pierre Pflimlin (plusieurs fois ministres et dernier Président du conseil de la IVème), son passé d’extrême-droite. Puis de 1958 à 1974, une interrogation : la Vèmeest-elle une république moderne et catholique ? Et de 1974 à 1997, une oscillation entre modernisation et restauration, avec une marginalisation du catholicisme : en 1966, 24 % des Français assistent à la messe dominicale ; en 1975, 13,5 % ; en 1986, 11 %. Avec certes l’appui de l’élection de Jean-Paul II en 1978. La dernière période (1997-2022) décrit un âge où le catholicisme est minoritaire, « se recompose avec ceux qui restent », « les catholiques de gauche étant devenus quasiment invisibles dans l’espace public ». Selon les besoins des uns et des autres, on trouvera là une synthèse informée de cette période.
Marcel Légaut et Gustave Thibon par Bernard Feillet
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« Un inconnu de moins en moins étranger »
À l’automne de sa vie, le vieux sage Gustave Thibon livre modestement cette confidence : « Plus je vieillis, plus Dieu m’est de plus en plus inconnu et de moins en moins étranger. » Celui qui a été l’ami de Jacques Maritain et de Gabriel Marcel et qui a mené sans les opposer sa recherche de philosophe et son travail de paysan rejoint ici l’attitude d‘un autre philosophe-paysan, son contemporain, Marcel Légaut. Thibon est né en 1903, Légaut en 1900 : ils ont traversé le siècle comme des guides qui ont découvert le chemin au fur et à mesure qu’ils s’y sont aventurés. Ces croyants au long cours ont suivi les étapes qui les ont conduits des formulations doctrinales à la question du mystère de Dieu dans leur vie telle qu’aujourd’hui elle plane au-dessus des frontières des religions et se retrouve toujours intense dans le champ sans limite des consciences.
Dans leur jeunesse, ils étaient plus proches de l’expression de la foi des jeunes témoins contemporains telle qu’elle s’exprime joyeuse et confiante, à l’occasion des grands rassemblements chrétiens de la jeunesse. Bien sûr, ces jeunes témoins ne représentent pas toute la jeunesse, et même si leur témoignage est quelque peu sélectif, il n’en représente pas moins clairement la spontanéité et le bonheur de leur foi.
Colloque international du centenaire du groupe Légaut
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Colloque international du centenaire du groupe Légaut
(Valence, Archives départementales, 10-11 septembre 2025).
Centenaire du groupe Légaut - 1925-2025
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Le centenaire du groupe Légaut en 2025.
En 1925, à la rentrée, Marcel Légaut, à Normale sup. va méditer les évangiles avec des normaliens de Saint Cloud, ouvrant ainsi l’univers du premier degré de l’enseignement à sa réflexion, celle d’un laïc. Le groupe Légaut, sans grande ossature, naît et après des péripéties variées, de Paris à Chadefaud dans le Massif Central, puis Les Granges de Lesches et Mirmande dans la Drôme, perpétue ses rencontres jusqu’à ce jour.
Il y aura plusieurs manifestations en 2025. Certes le conseil d’administration des 14-16 février 2023 a validé trois évènements :
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La mise en numérisation de l’oeuvre complète de Marcel Légaut, avec sa mise à disposition par le site de l’ACML. Paul Roux a piloté l’ensemble avec l’aide de nombre de membres de l’ACML, Serge Couderc, Jean-Jacques Chevalier, Jocelyn Goulet, Chantal Decoorebyter, François-Xavier Légaut, Dominique Roux, Rémy Légaut, Dominique Lerch, ...
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Une date : 10 septembre 2025 est à retenir à Valence aux Archives départementales (à côté de la Préfecture). Vous trouverez ci-joint l’appel à contributions qui concerne la vie des groupes, le rayonnement de Marcel Légaut, son apport, ses racines. N’hésitez pas à proposer des éléments, nous pourrions avoir une partie d’échanges sur la vie des groupes en suite des communications. Mais nous aurons aussi besoin de quelques coups de main pour l’accueil des communicants, l’hôtellerie, les repas, surtout si la journée d’études devient un colloque international où l’Espagne et le Québec sont d’ores et déjà partants et où nous ne désespérons pas d’avoir une contribution belge.