Quelques nouvelles décembre 2025
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Devenir disciple de Jésus (8)
Après quelques mois de succès arrivent toutes sortes de polémiques, car enfin on comprenait bien qu’il ne parlait pas comme les scribes et les docteurs. Il n’avait pas de titres universitaires, et même s’il en avait eus, on l’aurait critiqué, car on sentait bien qu’il ne parlait pas comme les scribes, il parlait avec je ne sais quelle autorité intime mais qui peut être contestée, puisqu’elle n’était pas écrite sur du papier. Du côté des conservateurs, c’était un révolutionnaire ; il n’observait pas la loi. Je n’insiste pas sur les miracles faits le jour du sabbat. Du côté des patriotes, de ceux qui voulaient qu’Israël devienne une nation indépendante, de manière à satisfaire à sa mission fondamentalement religieuse, c’était un démobilisateur qui prêchait la miséricorde au lieu de prêcher la violence. Il prêche la pauvreté et personne ne croira que les riches ici le suivraient pas à pas.
Démobilisateur d’un côté, opium du peuple de l’autre. Depuis vingt siècles, ça se répète avec un vocabulaire différent, mais en définitive, c’est toujours la même chose, car les voies de Jésus sont les voies de Dieu. Si les voies des profondeurs humaines ne supportent ni les facilités du pouvoir ni les facilités politiques, des deux côtés tout le monde était contre lui pour des raisons différentes mais unanimes pour le but final. Il était insupportable, aussi ne fut-il pas supporté très longtemps. Sa mort était nécessaire. Elle lui était imposée physiquement, sociologiquement, par les conditions dans lesquelles il avait jusqu’à présent vécu. Cette mort extérieure, imposée, était fatale, car il ne fallait pas être un grand prophète pour s’apercevoir que ça ne pouvait pas durer longtemps.
Mais c’est là, je crois, une chose fondamentale : il a compris que cette mort était nécessaire à sa mission et il a fait de la mort sa mort parce qu’il a compris que tout ce qu’il avait donné à ses disciples, ceux-ci l’avaient reçu à leur propre niveau. Tout ce qu’il leur apportait était ramené au niveau de leurs propres préoccupations. Il était grand temps qu’il s’en aille pour que de cette absence jaillisse une nouvelle présence qui leur permettrait d’être créateurs et pas simplement de trouver en Jésus celui qui répondait aux préoccupa-tions qu’ils avaient reçues de leur milieu. Il a fait de la mort sa mort en faisant de la mort qui venait du dehors le dernier acte de sa mission. Quand il a compris ces choses, il monte à Jérusalem, il va vers sa mort. Ayant compris que la mort était sa mort, son dernier acte, là où il s’accomplirait, où s’épanouirait sa mission, où elle prendrait toute sa puissance.
Le 4e Évangile s’efforce, après une longue médita-tion de ses auteurs, de mettre sur les lèvres de Jésus, avant et après la Cène, les discours que vous connaissez, cette merveille de profondeur qui fait qu’en un certain sens on découvre ce que Jésus a vécu avec ses disciples pendant ces quelques mois. Après c’est la nuit de Gethsémani, la dernière nuit de prière où nous découvrons de manière saisissante la transcendance de Jésus par rapport à ses disciples. La prière donne de la force à ceux qui savent prier, mais ça dévie l’âme de ceux qui cherchent dans la prière une évasion. (...) De cette prière, Jésus est sorti plus fort pour affronter les puissants de ce monde et ses disciples en sont sortis si faibles qu’ils l’ont abandonné, eux qui pourtant l’avaient suivi pendant ces quelques mois, malgré toutes les difficultés, les séparations, les hostilités qu’ils avaient rencontrées dans leur famille et autour d’eux. (à suivre)
Marcel LÉGAUT - Bruxelles 1976
Articles et Conférences - Ed. Xavier Huot
Cahier 8, Tome II p.279
Edito décembre 2025
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MARCEL LÉGAUT, UN « MUTANT »
Lors du récent colloque de Valence sur Légaut et son Groupe, deux conférences ont été consacrées à Alexander Grothendieck. Non parce que ce prestigieux chercheur a voulu rencontrer l’ex-professeur de mathématiques qu’était Légaut, mais parce que, l’ayant lu, il a été frappé par « l’extraordinaire convergence de deux expériences et de deux pensées… qui ne s’étaient jamais croisées ».
Sous la plume de Grothendieck, Légaut a été un « mutant », entendons : un de ces hommes d’exception qui sont à l’origine d’un changement radical, d’une mutation, dans notre vision du monde et notre façon de concevoir l’existence. Il faut reconnaître que cette qualification de « mutant » convient plutôt bien à Légaut.
Tout le monde convient – même les journalistes de Paris-Match ! – qu’il a « muté » de façon spectaculaire en 1940, lorsque, avec un courage apparemment inconséquent, il a troqué la vie protégée et honorée de l’universitaire pour celle, risquée et « enfouie », du paysan-berger en montagne.
C’est pourtant à un autre niveau que Légaut est un vrai mutant. Il l’est pour avoir pris cette décision, qu’on peut qualifier d’extravagante, non en raison d’un intérêt soudain pour la vie rurale et pour l’élevage des brebis, mais mû de l’intérieur par sa « fidélité à ce qu’il a estimé devoir faire pour être ce qu’il devait être ».
Légaut est un spirituel : les orientations à prendre, la voie à suivre, il ne les cherche pas, il ne les trouve pas en se mettant à l’écoute du « monde », des idées qui ont pignon sur rue, ni même en suivant les directives de son Église – à laquelle pourtant il reste attaché. S’il est mutant, c’est parce qu’il se met bien plutôt à l’écoute, dans ses profondeurs, des appels qui lui viennent du dedans – et auxquels il s’efforce de répondre.
Mutant, Légaut l’apparaît enfin de façon frappante, si l’on met en regard deux de ses livres : Prières d’un croyant, le premier qu’il ait écrit, livre de piété fervente, mais où l’emphase n’est pas absente et, d’autre part, Prières d’homme, écrit 50 ans après dans un tout autre esprit, puisqu’il s’ouvre sur cette idée, fruit d’une longue expérience, que « l’essentiel de la prière n’est pas dans ce qu’on dit, mais dans ce que l’on est ».
Pas étonnant qu’un tel mutant ait appelé, dans un autre de ses livres, à la mutation de son Église. Tout en étant conscient que cette mutation est conditionnée par la conversion personnelle de ses membres : que de chrétiens disciplinés qu’ils sont ils deviennent disciples – disciples de Jésus le Nazaréen.
Jean-B. MER (
RENCONTRES 2026
Le programme des Rencontres est en voie d’édition. En voici un aperçu :
Avril :
- 18-19 /04 : « Toucher le fil invisible de sa vie » : avec Serge Couderc et Bernard Lamy, à Besançon.
- Lundi 20-vendredi 24/04 : Rencontre de Printemps: avecDaniel Rosé : « Face aux abus sexuels et au cléricalisme. Mort et Résurrection de l’Église catholique ? » ; Dominique Lerch : « Les légendes du Groupe Légaut » ; Étienne Godinot : Bernard Besret, Patrick Valdenaire : Bernard Sichère.
Samedi 25/04 - 9h-17h : ASSEMBLÉE GÉNÉRALE DE l’ACML
Mai : 23-25/05 Rencontre du Groupe des « Fraternités Ignatiennes » de Vienne (38) « Devenir Soi ».
Juin : 22- 26/06 : « Chantier Ouverture et Ressourcement » : préparation de la Magnanerie avec François-Xavier Roux.
Juillet : Avec Patrick Valdenaire : « Semaine Initial » ; « Du corps comme lieu de possibilité d’un sujet » B.Sichère ;
Avec Anne-Françoise Valdenaire : « En explorant la tradition féministe ».
Août : Avec Julien Vermeersch :« Ora et Labora » ; « Ora et Crea » et « Lève-toi et marche » ; avec André Scheer :
« Se confronter au texte d’Évangile » ; avec Vincent Lalanne : « Homélies de Bernard Feillet 1990-1993 ».
Septembre : Avec Jocelyn Goulet et Claude Lessart :« Marcel Légaut à l’heure de l’Intelligence Artificielle (IA) »,
« De l’élan intérieur à l’acte créateur ».
Samedi 12/09 : Rencontre CA / Porteurs de Projets.
Comment notre monde a cessé d’être chrétien. Anatomie d’un effondrement.
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CUCHET, Guillaume.
Paris : Seuil, 2018, 284 p., 21 €
En France, en 1872, 98 % des 36 millions d’habitants étaient catholiques. Et envoyaient aux commandes de l’État, par les urnes, des majorités laïques voire anticléricales, sans que l’on ait réfléchi à
cette contradiction. Depuis, le catholicisme a reculé. Les 18-50 ans non affiliés au catholicisme sont près de 50 %, et l’Islam, avec cinq millions de fidèles, est devenu la seconde religion du pays. Selon une enquête réalisés en 2017, l’épiscopat estime qu’un tiers d’une génération est baptisée dans les sept ans et que le taux de pratique dominicale (tous les dimanches) est de… 1,8 % (p. 16, note 15). Et de s’interroger sur le décrochage, international (au Québec, un film, Un heureux naufrage en rend compte). Pour étudier ce décrochage, Guillaume Cuchet s’attache aux Matériaux pour l’histoire religieuse du peuple français, du chanoine Boulard qui livre une « auto-analyse sociologique » sur la pratique religieuse en France dans les années 1945-1965. Un premier chapitre du livre de Guillaume Cuchet décrit cette enquête qui révèle une grande variété de situations, en particulier, les trois pôles géographiques majeurs de la France chrétienne : le grand Ouest ; l’Est lorrain, alsacien et jurassien ; le rebord sud-est du Massif central (Haute-Loire, Tarn, Lozère, Aveyron). Démêler le rural de l’urbain ainsi que les conséquences des guerres mondiales, amènerait à penser une déchristianisation antérieure aux guerres, à la politique laïque et anticléricale de la IIIe République, voire, au XVIIIe siècle. Immanquablement, pour Cuchet, la Révolution française porte sa part de responsabilité : « La politisation de la question religieuse a été, en France, pour toute une partie de la population, un facteur de longue durée de dévitalisation religieuse » (p. 80). Certes, demeure un attachement à la culture catholique : la géographie des dons aux « œuvres » ou du don du sang atteste de valeurs, comme un style politique étranger aux extrêmes, des rites de passage ou l’attachement au patrimoine culturel. Toutefois, sans pratique, cette culture « s’en ira avec la seconde parce que leurs destins sont liés » (p. 84).
À la droite du père. Les catholiques et les droites de 1945 à nos jours
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À la droite du père. Les catholiques et les droites de 1945 à nos jours, Seuil, 2022, 783 p.,
Ouvrage collectif sur la direction de Florian Michel et Yann Raison du Cleuziou.
Si les droites en France ont été explorées par les travaux de René Rémond (La Droite en France, 1954, et ses rééditions), l’analyse du vote des catholiques restait un angle mort : les 3/4 des catholiques ont continué à voter à droite durant la période de 1945 à nos jours. Certes, un travail de défrichage a eu lieu, mais seuls les extrêmes ont été labourés, ne serait-ce que LMPT (La Manif pour tous). Le choix des responsables est double :
- Assurer un développement chronologique qui rend compte des évolutions, avec de 1945 à 1958, la Libération et la revanche des démocrates chrétiens, le MRP et ses figures, dont on découvre, pour Pierre Pflimlin (plusieurs fois ministres et dernier Président du conseil de la IVème), son passé d’extrême-droite. Puis de 1958 à 1974, une interrogation : la Vèmeest-elle une république moderne et catholique ? Et de 1974 à 1997, une oscillation entre modernisation et restauration, avec une marginalisation du catholicisme : en 1966, 24 % des Français assistent à la messe dominicale ; en 1975, 13,5 % ; en 1986, 11 %. Avec certes l’appui de l’élection de Jean-Paul II en 1978. La dernière période (1997-2022) décrit un âge où le catholicisme est minoritaire, « se recompose avec ceux qui restent », « les catholiques de gauche étant devenus quasiment invisibles dans l’espace public ». Selon les besoins des uns et des autres, on trouvera là une synthèse informée de cette période.



Le livret "Toucher le fil invisible de sa vie" a été édité et distribué pendant le colloque de 2025. Pour les groupes ou personnes qui souhaiteraient pouvoir en acquérir un lot pour distribution, nous le vendons par 10 exemplaires.